Il existe des escroqueries en ligne qui vont bien au-delà de la simple fraude financière.
Le pig butchering — ou Shāzhūpán en chinois — en fait partie. Cette méthode consiste à “engraisser” une victime en lui faisant miroiter amour, amitié ou réussite financière, avant de la dépouiller brutalement. Mais derrière l’écran, la réalité est encore plus sombre : ces arnaques reposent sur un système mafieux qui exploite des milliers de personnes dans des conditions proches de l’esclavage.
Des fermes de scams au cœur de l’Asie du Sud-Est
En Birmanie, au Cambodge ou au Laos, d’immenses complexes ressemblant à des centres d’appels ont été transformés en véritables usines à escroquerie.
Les escrocs y opèrent selon des scripts bien rodés : ils créent des profils séduisants sur les réseaux sociaux, instaurent une relation de confiance, puis guident leurs cibles vers de fausses plateformes de trading ou de cryptomonnaies.
Pour la victime, cela ressemble à une conversation privée. En réalité, c’est une machine organisée, méthodique, contrôlée par le crime organisé.
La zone de Dongmei : un épicentre du crime transnational
La zone de Dongmei, située entre Birmanie et Thaïlande, est aujourd’hui l’un des points névralgiques de cette industrie criminelle. On y retrouve des hommes et des femmes venus de Chine, de Taïwan, de Thaïlande, du Vietnam, des Philippines, de Malaisie, mais aussi du Pakistan, du Bangladesh, du Kenya, du Ghana ou du Maroc.
La promesse est toujours la même : un emploi stable et bien payé. Mais une fois arrivés, leurs papiers et téléphones sont confisqués. Ils sont séquestrés dans des complexes gardés par des milices locales, notamment les milices Karen. Là, ils sont contraints d’arnaquer à la chaîne, sous la menace des armes.
Ces fermes sont tenues par des triades chinoises, qui pilotent un trafic d’ampleur mondiale.
Selon les chiffres du Transnational Crime Programme, près de 305 000 personnes étaient piégées dans ces zones en 2024. Cette économie souterraine aurait généré environ 43,8 milliards de dollars.
Dans cette mécanique implacable, de nombreux travailleurs disparaissent tout simplement. Une fois qu’ils ne rapportent plus assez, qu’ils tombent malades ou qu’ils tentent de résister, ils sont parfois “écartés” par les réseaux criminels. Certaines familles n’ont jamais revu leurs proches partis pour un soi-disant emploi digital. Ces disparitions rappellent que nous sommes face à une forme d’esclavage moderne, où la vie humaine n’a aucune valeur aux yeux des exploitants.
Pourquoi ces arnaques font tant de dégâts
Si ces escroqueries fonctionnent, c’est parce qu’elles touchent à des cordes sensibles :
- la solitude,
- le besoin de confiance,
- l’espoir d’une réussite financière rapide.
Les plateformes frauduleuses sont conçues pour paraître crédibles. Les premiers gains affichés semblent réels. Tout est fait pour que la victime pense avoir trouvé une chance unique.
Les signaux d’alerte
Certaines situations doivent immédiatement éveiller la vigilance :
- une personne inconnue qui vous contacte sans raison,
- une relation en ligne qui dérive vite vers des discussions financières,
- l’insistance pour investir sur un site précis,
- des gains “bloqués” au moment du retrait.
Comment se protéger et protéger ses proches
La prévention reste notre meilleure arme :
- n’investissez jamais via une plateforme que vous ne connaissez pas,
- vérifiez toujours si l’entreprise est régulée (en France : registre de l’AMF),
- gardez une distance critique avec les contacts en ligne trop insistants,
- parlez-en autour de vous, car les personnes isolées sont les premières cibles.
Mon regard d’expert du web
Depuis plus de vingt ans, j’accompagne des entreprises et des particuliers dans leur usage du web. Je le dis avec gravité : nous assistons aujourd’hui à une dérive où cybercriminalité et exploitation humaine se rejoignent.
Le pig butchering n’est pas qu’une arnaque : c’est une industrie mondialisée, qui broie à la fois les victimes financières et les travailleurs contraints d’y participer.
Alors je vous invite à rester attentifs, à vérifier chaque promesse trop belle pour être vraie et surtout à partager cette information. Parce que la vigilance numérique est devenue un enjeu collectif.
Georges Corre – Expert web & SEO, cor.re